Dahir n° 1-03-113 du 18rabii II 1424 (19 juin 2003) portant promulgation de la loi n° 71-99 portant statut de l'artiste

Bulletin Officiel n° : 5126  du  17/07/2003 - Page : 776

 

Dahir n° 1-03-113 du 18 rabii II 1424 (19 juin 2003) portant promulgation

de la loi  n° 71-99 portant statut de l'artiste

 

Louange à Dieu seul !

 

(Grand Sceau de Sa Majesté Mohammed VI)

 

Que l'on sache par les présentes - puisse Dieu en élever et en fortifier la teneur !

 

Que Notre Majesté Chérifienne,

 

Vu la Constitution, notamment ses articles 26 et 58,

 

A décidé ce qui suit :

 

Est promulguée et sera publiée au Bulletin officiel, à la suite du présent dahir, la loi                        n° 71-99 portant statut de l'artiste telle qu'adoptée par la Chambre des conseillers et la Chambre des représentants.

 

Fait à Rabat, le 18 rabii II 1424 (19 juin 2003).

 

Pour contreseing :

 

Le Premier ministre

 

DRISS  JETTOU

 

*

*        *

 

Loi n° 71-99

Portant statut de l'artiste

 

Préambule

Eu égard au patrimoine civilisationnel du Royaume du Maroc qui a toujours été caractérisé par la richesse et la diversité de sa création et la pluralité de ses expressions ;

 

Partant des Hautes Directives Royales contenues dans les messages adressés par Feu Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu ait son âme, aux colloques et congrès artistiques tenus dans notre pays, et l'extrême sollicitude que Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le glorifie, n' a cessé d'accorder à la situation morale de l'artiste et aux structures de la création artistique et de sa diffusion ;

 

Etant donné que le développement des techniques de la production artistique nécessite de revoir le statut des artistes, l'encouragement de l'entreprise artistique et l'instauration de pratiques nouvelles en matière de diffusion du produit artistique ;

 

Conscients du fait que les artistes marocains, toutes expressions et tendances confondues, participent à la préservation de l'identité de la Nation, au renforcement de ses fondements et à la défense de sa position civilisation et culturelle dans le concert des Nations ;

 

Considérant la Volonté de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le préserve, de faire bénéficier les artistes d'un statut juridique à même de préserver leur dignité, d'organiser leur profession et de leur assurer les possibilités de création et de continuité.

 

Chapitre premier

Dispositions préliminaires

 

Article 1

Définitions

1.      Est considérée comme « artiste », toute personne physique exerçant de manière permanente ou intermittente une activité artistique moyennant rémunération, dans le cadre d'un contrat de travail ou d'un contrat d'entreprise ou dans, le cadre de la réalisation d'une œuvre artistique destinée à être vendue, louée au tiers ou effectuée au profit d'une administration publique, d'une collectivité locale ou d'un établissement public.

2.      Est considérée comme « activité artistique » toute activité ayant pour objet une création ou une représentation artistique :

a)     Constitue une « création artistique » toute œuvre artistique réalisée par une personne physique, notamment dans le domaine de l'audiovisuel, de la photographie, des arts plastiques, de la musique, du théâtre, de la littérature artistique écrite ou orale ou de la chorégraphie.

b)     Constitue une « représentation artistique » tout acte ayant pour objet la présentation ou la réalisation artistique d'une partie ou de la totalité d'une œuvre artistique par une personne physique, par tout moyen que ce soit, notamment dans les domaines de la musique, du théâtre, des variétés, du cirque ou de spectacles de marionnettes.

3.     Est considéré « entrepreneur artistique » toute personne physique ou morale qui conclut avec un artiste un contrat de travail ou un contrat d'entreprise dont l'objet est de réaliser une activité artistique moyennant rémunération.

4.      Est considéré « contrat individuel » tout accord conclu à titre individuel entre un artiste et un entrepreneur artistique. Est considéré « contrat collectif » tout accord conclu entre un groupe d'artistes et un entrepreneur artistique.

5.      On entend par agence de services artistiques toute personne morale qui assure le rapprochement entre l'offre et la demande de travail artistique, sans que l'intermédiaire ne soit partie prenante dans le rapport de travail artistique.

6.      Est créée, en vertu de la présente loi, une carte professionnelle délivrée à toutes les personnes pour lesquelles s'appliquent les définitions visées ci-dessus. Les conditions et les modalités de délivrance de cette carte sont fixées par voie réglementaire.

 

Article 2

Est considérée rémunération au sens de la présente loi :

a)      toute somme d'argent et ses accessoires que ces derniers soient pécuniaires ou en nature perçus par l’article pour l'exécution d'une activité artistique.

b)             tous payements perçus par l'artiste en contrepartie de sa renonciation à un privilège ou à l'un des droits d'auteur et issus de l'exploitation de la création ou de la représentation artistique.

 

Chapitre II

Relation liant l'entreprise artistique à l'artiste

 

Article 3

Le contrat entre l'entrepreneur artistique et l'artiste du spectacle est conclu pour une durée déterminée ou pour la réalisation d'une activité artistique déterminée.

 

Article 4

Le contrat conclu entre l'entrepreneur artistique et l'artiste du spectacle est assimilé à un contrat de travail.

 

Le contrat de travail peut être commun à un groupe d'artistes engagés en vue de présenter un spectacle déterminé ou d'exécuter collectivement une œuvre artistique. Dans ce cas, le contrat doit faire mention nominale de chaque artiste et fixer sa rémunération à titre individuel. Une copie dudit contrat collectif signé doit être remise à chaque artiste et mentionner, le cas échéant, la gratuité de la ou des représentations artistiques.

 

Le contrat de travail collectif peut n'être revêtu que de la signature d'un seul artiste du groupe, à condition que le signataire ait reçu mandat écrit et signé de chacun des artistes figurant au contrat de travail collectif.

 

Le contrat de travail collectif doit mentionner la rémunération de chaque artiste à côté de son nom et prénom.

 

Article 5

Lorsque le contrat est collectif et concerne un groupe de personnes, seuls les artistes du spectacle sont réputés exercer leur activité artistique dans le cadre du contrat de travail.

 

Quelle que soit la nature du contrat, individuel ou collectif, le mode de versement de la rémunération, son montant ainsi que la qualification donnée au contrat par les parties ne modifient en rien la nature du contrat de travail liant l'entreprise artistique aux artistes du spectacle. Le fait que l'artiste soit propriétaire de tout ou partie du matériel utilisé personnellement par lui ou conjointement avec d'autres personnes ne produit pas d'effet sur la nature du contrat, dès lors qu'il participe personnellement au spectacle.

 

Article 6

L'artiste employé dans une entreprise artistique est considéré, quelle que soit la dénomination du contrat, comme salarié soumis aux dispositions du code du travail sauf dispositions spéciales prévues par la présente loi ou autres textes législatifs et sous réserve des dispositions prévues en matière de protection des œuvres littéraires et artistiques ou d'oeuvres artistiques réalisées par des artistes appartenant à un cadre de la fonction publique.

 

La relation liant l'entreprise artistique à l'artiste doit être fondée, outre les dispositions législatives, sur le respect de la déontologie de la profession.

 

Article 7

Le contrat de travail conclu entre l'entreprise artistique et l'artiste du spectacle doit être établi par écrit.

 

Le contrat de travail liant l'artiste du spectacle à l’entrepreneur artistique doit être modifié chaque fois qu'un changement intervient au niveau de la qualité professionnelle de l'artiste, de sa rémunération ou de la durée du contrat.

 

Article 8

Toute rupture abusive du contrat ouvre droit au profit de l'autre partie à des indemnisations fixées selon les conditions prévues dans le contrat. A défaut de stipulation de telles conditions, sont appliquées les dispositions relatives à la rupture abusive de contrat prévues dans le code du travail.

 

Chapitre III

Rémunération

 

Article 9

Lorsqu'il s'agit de la présentation ou de la réalisation d'une activité artistique exigeant une durée supérieure à quinze jours, les dates de versement de la rémunération peuvent être fixées de gré à gré par l'artiste et l'entreprise artistique, à condition que l'artiste perçoive obligatoirement une avance sur rémunération tous les quinze jours, de manière à en percevoir la totalité à la fin de la durée du contrat ou à la fin de la réalisation de l'oeuvre artistique convenue.

 

Article 10

Le montant de la rémunération doit être mentionné dans le contrat.

 

Le contrat doit établir la distinction entre les rémunérations prévues au a) et au b) de l'article 2 ci-dessus.

 

Article 11

Un récépissé du versement de la rémunération mentionnant les taxes et prélèvements en vigueur ainsi que les cotisations prévus à l'article 13 ci-après doit être délivré.

 

Article 12

L'artiste du spectacle bénéficie du privilège prévu à l'article 1248 du dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913) portant code des obligations et des contrats pour le recouvrement des rémunérations et indemnités dont l'entreprise artistique lui est redevable, l'ensemble des biens mobiliers de l'entreprise, en application des dispositions dudit article et selon les conditions qu'il prévoit.

 

Les indemnités légales résultant de la rupture abusive du contrat par l'entreprise artistique bénéficient du même privilège avec le même rang.

 

Chapitre IV

Protection sociale

 

Article 13

L'artiste soumis aux dispositions de la présente loi bénéficie de la législation relative aux accidents de travail, à la sécurité sociale et à la couverture médicale de base.

 

L'autorité gouvernementale chargée de la culture veille, dans le cadre des lois en vigueur, à mettre en place un outil de financement des œuvres sociales en faveur des artistes.

 

Chapitre V

L'artiste mineur

 

Article 14

Il est interdit d'employer un mineur âgé de moins de dix-huit ans